vendredi 11 septembre 2009

Faut aimer...


...mais moi, ça va, merci, j'ai grandi avec du Cenovis sur mes tartines.
Du coup, je peux faire mon petit effet outre-Manche en empoignant le pot de Marmite pour en couvrir un toast beurré. La mine déconfite des Britons persuadés de me voir m'étrangler dans la minute vaut son pesant d'oeufs au bacon.

Bref, icitte, c'est de bière qu'on cause, alors venons-y. Tout comme le Cenovis helvétique et le Vegemite australien, le Marmite britannique est une icône née dans les années 30 d'un recyclage de la levure de bière.
D'ailleurs, le Marmite est né à Burton-on-Trent, un des berceaux de la bière britannique, et le Cenovis a été produit pendant longtemps à Fribourg, puis à Rheinfelden, la proximité de grandes brasseries étant une simple mesure de bon sens, même si leur bière n'est pas nécessairement fameuse...
La brasserie Guinness a aussi produit elle-même une pâte du genre à Dublin jusque dans les années 50.

Le principe de fabrication est simple : la levure est additionnée de sel et chauffée doucement jusqu'à devenir, par action de ses propres enzymes, une pâte brune au goût "viandeux" caractéristique - c'est d'ailleurs un faux goût qu'on retrouve parfois dans la bière, quand il y a autolyse, à savoir mort et désagrégation, de la levure de refermentation dans la bouteille.

On y ajoute ensuite de l'extrait de légumes (le Vegemite contient de l'extrait de malt, aussi) et c'est prêt à tartiner... ou à employer pour gonfler le fond de sauce un peu court ou clairet d'un rôti, par exemple. Les Britanniques l'emploient aussi pour accompagner le cheddar... enfin: les versions industrielles insipides du cheddar peuvent en avoir besoin, pas le cheddar fermier digne de ce nom, qui tient sans peine son rang face à un bon gruyère suisse (sans trous).

Un des coups fumants de Marmite ces dernières années, a été, début 2007, la série limitée Guinness, contenant 30% d'extrait de levure provenant de chez Guinness.
Et ils ont remis ça cet été avec une série limitée Marstons, dans un pot qui tente de ressembler à une balle de cricket, y compris la couture en trompe l'oeil très kitsch sur les côtés, vu que Marstons est sponsor de l'équipe anglaise de cricket.
L'opération a été lancée pour The Ashes, tournoi ancestral de cricket opposant l'Angleterre à l'Australie, que les Anglais on d'ailleurs gagné cette année.

Les pots contiennent 10% (c'est la crise ?) d'extrait de levure de Marstons Pedigree, une bière qui est la dernière à être fermentée dans des burton unions - un dispositif complexe de fûts de chêne reliés entre eux, avec des cols de cygne pour l'évacuation de l'excès de levure- et a un profil assez caractéristique. Au goût, contrairement à la version Guinness, la différence avec le Marmite normal est toutefois assez peu marquée, on cherche en vain la touche un peu soufrée typique des pale ales de Burton.

Donc oui, ça va pas révolutionner nos tartines, mais bon, c'était l'occasion de ramener un peu ma science sur le recyclage de la levure de bière. Faut ce qu'il faut.

Pour les fétichistes de la pâte brune et autres expat' Britons en Suisse, cette série limitée est pour le moment en vente chez Britshop.ch À fr. 10.90 le pot de 250 grammes. C'est de l'épicerie fine, et quand on aime, on ne compte pas.

PS : à quand une série limitée de Cenovis avec de l'extrait de levure de chez, par exemple, Boxer, Cardinal, Eichhof ou Locher, que ça occupe un peu les commerciaux de service ?

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