vendredi 30 octobre 2009

Cardinal avec ou sans ?

C'est fou ce qu'on trouve dans les recoins du Grand Cyberfoutoir Planétaire...

Il y a six semaines, je faisais allusion au fait que les bières sans alcool ne servaient manifestement à Carlsberg Suisse que dans une perspective de contournement de la loi en matière de publicité à la télévision, et je faisais allusion à l'affaire, il y a quelques années, du spot Cardinal quasi-identique pour la version sans (à la télé) et avec alcool (au cinéma).

Et là, on dit merci à IouTioube, moderne tonneau des Danaïdes :

version cinéma

version télévision

Edifiant, non ?

vendredi 23 octobre 2009

Recette pour fainéant.

Celle-ci est une légère adaptation d'une recette qui refait régulièrement depuis une bonne décennie sur le forum usenet fr.rec.cuisine et dont un certain François Leloup serait, autant que j'aie pu m'en assurer, le créateur à l'origine. Qu'il soit remercié ici de cette contribution majeure à la cuisine à la bière.

Dans le genre, c'est de la cuisine fainéante et décadente. Pas loin de la perfection, quoi.


Le plus difficile de l'opération - du moins en Suisse - c'est de mettre la main sur des cuisses de canard: A part des bouchers bien fournis en volaille, il n'y a guère que Manor qui vendent ça de manière plus ou moins régulière au rayon alimentaire.


Canard à la Bière

Ingrédients : 

- 2 cuisses de canard
- une douzaine d'olives noires
- 330 ml de bière*
- une giclée de vinaigre de malt
- évt. un peu de fécule pour lier en fin de cuisson

* Choix de la bière : ambrée ou brune, au caractère très malté et avec aussi peu d'amertume que possible, vu la longue cuisson. C'est le genre de recette idéal pour liquider ces L*ffe Radieuse, ces M*redsous 8, ces K*steel Brunes etc. bien doucereuses qui traînent à la cave. 
Mais ça pourrait aussi très bien se faire avec une Schneider Aventinus, par exemple.


Préchauffer le four à 120°C.
Disposer le canard et les olives dans un plat à four, verser la bière et le vinaigre. Mettre au four.
Laisser 3 à 4 heures en retournant toutes les heures.
Corriger l'assaisonnement, éventuellement lier le jus.
Servir avec une purée et quelques légumes ou une salade.

On peut le faire la veille et le mettre au frais, ce qui permet de récupérer un peu tout ce gras qui surnage...

Et pour pousser, une bière ambrée ou brune plus sèche et amère que celle qui a servi dans le plat, par exemple une Märzen ou une Altbier allemande, ou éventuellement une vieille brune acide comme une Liefmans Goudenband ou une Duchesse de Bourgogne, voire leurs déclinaisons à la cerise...

mardi 20 octobre 2009

Prochainement, dans une brasserie près de chez vous...

... pour les amateurs zet amatrices de blanches hérétiques, la Nuit de la Fraîcheur à la Brasserie Trois Dames de Ste-Croix le samedi 24 octobre dès 19 heures.
Plus de détails et téléchargement du flyer ici.

... le légendaire Brassin Public de la Brasserie des Franches-Montagnes à Saignelégier aura quant à lui lieu le vendredi 6 novembre au soir et le samedi 7 novembre toute la journée.
Le flyer "bricole-it-yourself"avec tous les détails et plein d'activités manuelles pour entraîner la motricité fine avec les ciseaux est maintenant téléchargeable ici.

lundi 19 octobre 2009

Mondial de Strasbourg, retour.


Le premier Mondial de Strasbourg a fermé ses portes hier dimanche sur un bilan mitigé, selon l'AFP reprise par Cyberpresse, avec 10'000 visiteurs au lieu des 15'000 à 20'000 attendus. Mais le salon sera reconduit en 2010, en tablant sur le bouche-à-oreille.

Par la grâce d'un aller-retour pas cher avec la carte TER de l'ami Pascal, j'y étais, à Strasbourg, ce samedi, à titre purement personnel, en touriste... ça me change.

Arrivés un petit peu après midi, le festival bruissait très doucement dans un relatif vide (cf photos), et en repartant un petit peu avant 19 heures, ce n'était toujours pas la grande foule, donc le nombre d'entrées annoncé par les organisateurs ne m'étonne pas outre mesure.


Ce qui était surtout frappant, c'est la relativement forte proportion d'amateurs plus ou moins chevronnés venus de plus ou moins loin en France et à l'étranger, y compris un perceptible contingent nord-américain, par rapport aux consommatrices et consommateurs locaux - dont la présence aussi massive que possible est nécessaire à tout festival brassicole pour équilibrer ses comptes, que ce soit à Londres, Copenhague ou Sint Niklaas.

Donc Gérârd-et-Frônck-qui-roulent-à-la-Kro ne sont apparemment  pas venus. J'évoquais dans mon billet précédent sur le Mondial les prix affichés comme un écueil possible - non qu'ils soient trop élevés, mais bien que le public local ne soit pas prêt à les accepter... - et on dirait bien que ça s'est confirmé.
C'est sage de la part des organisateurs de tabler sur le bouche-à-oreille, les deuxièmes et troisième édition étant déterminantes dans ces conditions-là. Gérârd-et-Frônck-qui-roulent-à-la-Kro, s'ils ont bloqué face au prix d'entrée, se laisseront peut-être convaincre la prochaine fois par leurs quelques potes qui s'y sont rendus cette année et y ont pris quelques salutaires claques qui ont élargi leurs horizons gustatifs...



Sur le plan d 'un impact durable sur la paysage brassicole français, il est surtout indéniable que ce Mondial aura amené à un public majoritairement français nombre de bières aux goûts tranchant sérieusement avec la dominante du "goût belge" et du sucré qui y a cours. Surtout côté houblonnage plus ou moins massif.
Là, c'est clairement le fait de la composante québécoise de l'organisation, qui fonctionne sur des bases plus ouvertes et avec des réseaux plus étendus que le petit landerneau brassicole français qui tourne un peu en circuit fermé sur une base francocentrique, profondément monolingue, peinant à vraiment comprendre des traditions différentes de la sienne.

Mais encore faudrait-il que les personnes vendant ces bières aient une vague compréhension de ce qu'elles vendaient. Il ne suffit pas de planter un bénévole, même bien disposé, à un stand avec une feuille de notes de dégustation - souvent en anglais - pour que cette personne sache miraculeusement ce qu'il y a à expliquer et comment conseiller le client par rapport à des bières suédoises, étasuniennes ou britanniques.


A ce niveau-là, la présence des brasseurs de quelques-unes des brasseries italiennes et québécoises présentes a fait la différence. Ce n'est pas un hasard s'il y avait presque toujours un attroupement devant les stands de Dieu du Ciel, de Baladin et de Birra del Borgo, le service et le conseil qui y étaient prodigués étant impeccables...

Au stand Baladin, un échantillon de X-Fumé servi par Maître Teo lui-même fut d'ailleurs un moment d'intense contemplation... Il s'agit d'une déclinaison de ses Xyauyù, bières plates et volontairement madérisées aux airs de vieux portos qui laissent toujours leur petit monde comme deux ronds de flan, à laquelle a été ajouté du lapsang souchong pour sa fumée qui développe un registre de charbon et de goudron frais. Ce fumé est parfaitement intégré dans la douceur et le fruité intenses de la bière de base. Une fois de plus, Teo Musso a fait la preuve de sa capacité à faire évoluer ses produits toujours plus avant en gardant des profils fondamentalement harmonieux. Respect !



Côté restauration, l'offre était bonne, variée et adaptée à un pareil évènement. Un peu chère, peut-être, et les espaces restaurant occupaient pas mal de place en restant passablement vides. Il serait peut-être préférable de n'avoir que des stands de nourriture à l'emporter et des espaces libres munis de tables et de chaises.

Par contre, pas de problème avec les caisses à coupons à l'intérieur, les stations de lavage des verres et la boutique, où les tarifs étaient étonnamment abordables... le lieu, relativement lumineux et pas trop agressif sur le plan acoustique est parfaitement approprié, bien relié au réseau de transport publics, donc la base en termes d'infrastructure est fondamentalement saine et permettra une évolution occupant plus d'espace.

L'un dans l'autre en gardant à l'esprit que c'est une première et qu'elle sert par nature au rodage de l'organisation, le bilan est globalement positif, et le potentiel de progression est réel et tout à fait concret...
Sans oublier l'occasion unique en termes de réseautage, de serrage de mains, de retrouvailles et de nouvelles connaissances.

Bref, l'évolution sera intéressante à observer l'an prochain.
Les dates sont déjà fixées : 22 au 24 octobre 2010, même lieu.

vendredi 16 octobre 2009

"Premier prix" : le paradoxe helvétique

D'aucuns se souviennent certainement d'une certaine émission de télévision avec un test de bières blondes.
A la consternation générale, la Denner Lager était sortie deuxième, devant nombre de grandes marques.

Consternation générale ? Pas vraiment.
A l'époque, Sidonie Bündgen, elle-même brasseuse, qui avait participé à l'émission, avait résumé la situation hors caméra en un cinglant "Normal... quand tu bois de la Denner Lager, on te fait pas payer les parasols !"
Exactement... Si la Denner Lager s'en était bien tirée, c'est parce qu'en Suisse, certaines marques de distributeurs sont produites sans recourir à des petites économies honteuses genre brassage et fermentation à haute densité (cf. l'aveu du directeur d'Heineken Suisse, face caméra, dans ladite émission A Bon Entendeur du 6 octobre 2006... Luc Mariot avait fait très fort sur ce coup-là !)

Typiquement, pour augmenter le rendement d'une installation de brassage d'une capacité donnée, on brasse et on fermente une bière à une densité correspondant à 7 ou 8% d'alcool, mais on la dilue, au conditionnement, pour qu'elle revienne aux 4,7 ou 4,8% "normaux". Ce qui permet de produire facilement 20 ou 25% de bière en plus avec les mêmes cuves.
L'effet est le même que si on dilue un thé très fort : un joli goût aqueux du produit fini, quoi qu'en disent les producteurs, qui n'aiment pas en parler, mais pas du tout. En fait, c'est la meilleure façon de causer un froid glacial quand on visite une brasserie industrielle...
Bon, lesdites brasseries industrielles vivent du fait qu'une majorité de la population n'accorde aucune importance au goût des choses, alors pourquoi ils se gêneraient de jouer aux dilueurs fous, hein ?

Bref, les bières "premier prix" sous marques de distributeurs suisses semblent parfois produites sans passer par ce petit raccourci honteux, si on en juge par les quelques bonnes surprises qu'il y a dans ce secteur-là.

Peut-être bien parce que ces bonnes surprises, étant produites en tonnages pas très importants vu la taille du marché suisse, ne justifient pas de se livrer à ce petit jeu-là. (Chose qui avait été étayée par le bon classement, dans le test évoqué, de la Valaisanne Blonde 25, un produit Carlsberg Suisse, mais elle aussi produite en petit tonnage à Sion)

C'est très difficile sur ce créneau-là de déterminer qui produit quoi, les étiquettes étant obstinément muettes (contrairement au bières bio sous marques de distributeur, vu que le cadre du Bio prévoit la transparence quant au titulaire de la licence bio, qui doit être indiqué sur l'emballage)... mais des rumeurs plus ou moins persistantes circulent.
La Denner Lager sortirait apparemment des cuves d'une brasserie appartenant à Ramseier (ex-Unidrink, ex-Lupo's Getränke). C'était aussi le cas de la bière Farmer - blonde et brune - vendue dans tous les Landi du pays, qui est une autre de ces bières surprenantes de caractère en regard de son prix, jusqu'à ce que Landi changent de commanditaire et se fournissent en Allemagne.

Le cas le plus spectaculaire est cependant celui de la bière Helvetia / Prix Garantie de Coop (produite par Heineken Suisse, si l'on en croit le rapport de la Commission de la concurrence sur la reprise d'Eichhof par Heineken en 2008, page 14... ), qui, en dégustation à l'aveugle, domine non seulement les autres marques distributeur bas de gamme de la Coop comme Tell (produite elle aussi par Heineken Suisse), mais aussi les grandes marques qui coûtent trois fois et demi plus cher (Par exemple, l'Heineken, qui sort de la même brasserie, coûte Fr. 2.20 la boîte de 500ml, contre -.65 pour la Prix Garantie...)
Pas une bière exceptionnelle, mais quelque chose de vraiment correct, avec un petit peu de corps, un houblon floral vraiment perceptible au nez et une bonne amertume en sortie. Un bon exemple, honnête et éminemment buvable, de Schweizer Lager Hell (cf. mon topo sur l'héritage du cartel de la bière en Suisse)

Quand il s'agit, au bureau, d'organiser des apéros, par exemple quand un ou une collègue nous quitte, la question que me posent souvent mes collègues c'est "on prend quoi comme bière ?", certains qu'il faut du spécial ou du cher pour me satisfaire, avec ma réputation...
Quand je réponds "oh, si tu vas à la Coop, prends de la Prix Garantie...", y'a des mâchoires qui tombent, parmi ceux qui ne sont pas encore au courant, tant le schéma "premier prix = bêêrk / grande marque = miam" est enraciné dans les esprits...

Moralité : c'est mieux de soutenir les petites brasseries locales et les micros, mais quand il faut de la bière "sacrifiable" en quantité pour une fête, de la bière qui soit à la fois pas chère, acceptable par les profanes, et vraiment, honnêtement buvable, c'est, paradoxe helvétique oblige, du côté des "premier prix" qu'il faut chercher, parce qu'il y a quelques perles...

jeudi 15 octobre 2009

Rien à voir...


... avec les considérations bièreuses habituelles, mais le dernier CD de Format A'3 tourne en boucle depuis 2 heures sur ma platine, et c'est monstre bjien. Si on aime le post-jazz des trois compères, bien sûr.

mercredi 14 octobre 2009

Mondial de la bière, Strasbourg


Dix ans après la dernière édition d'Eurobière, Strasbourg verra à partir de ce vendredi la première édition du Mondial de la Bière en Europe (l'original ayant lieu à Montréal), au Parc des Expositions de Wacken (comme Eurobière).

C'est clairement une bonne chose que ce genre de manifestation grand public existe à nouveau quelque part en France, ne serait-ce que pour élargir un petit peu les horizons des amateurs français...

Il y a eu quelques lamentations du côté des brasseurs alsaciens, si l'on en croit L'Alsace, qui n'ont pas pu mettre en place un stand commun, Heineken France et Carlsberg France (Kronenbourg) ayant décliné l'invitation.
Bon, euh, là, c'est pas pour dire, mais ça peut pas faire de mal à l'image de la bière alsacienne d'être représentée sans les deux gros de service, sans leur sirop de glucose, leur caramel colorant et leurs antioxydants (regardez un peu la composition sur une boîte de 1664, pour voir...), sans leurs bières aromatisées aux concepts douteux, et surtout sans leur force de frappe côté marketing.
Peut-être que du coup Gérârd et Frônck qui roulent uniquement à la Kro vont essayer autre chose. On peut rêver...

Mais Gérârd et Frônck risquent d'être déçus s'ils veulent se péter le groin : les dégustations ne font que 12,5 cl. Bon, le verre peut en contenir deux, soit 25 cl...
Là, on a un signe clair, un appel à une consommation modérée, repris de l'usage du Mondial à Montréal (dégustations de 4 onces), et c'est une très bonne chose !
Un appel à la modération qui vise aussi le porte-monnaie: 6 Euros pour l'entrée, puis 7 euros pour un carnet de dix coupons, les dégustations de 12,5 cl coûtant de deux à cinq coupons, soit, pour 25 cl, entre 2.80 et 7 Euros.
Pour un Suisse qui a connu les tarifs des bars norvégiens (de 17 à 21 francs suisses pour une bouteille de 500ml de bière de micros locale), pas de quoi sourciller, mais je crains que ça ne douche passablement les consommateurs français, et, plus encore, allemands, moins habitués à ce genre de niveau de prix...

La liste des produits et exposants (téléchargeable ici), avec 400 bières, et très honorable pour une première édition. La représentation solide des micros étasuniennes, québécoises, japonaises et italiennes, par exemple, au milieu des françaises, des allemandes et des belges, est une bonne surprise.

Par contre, il y a des lacunes ailleurs.
Par exemple côté scandinave, une région que l'on sait devenue très riche en bières de caractère au cours des 10 dernières années, il n'y a que trois micros suédoises présentes. Un bon début, sans plus.
Côté britannique, à part un stand avec all the usual suspects comme Youngs & Wells, Wychwood, Black Sheep ou Batemans, rien de tellement inédit sur le continent, et peu de bières qui fassent vraiment justice aux forces des brasseurs britanniques côté bières de caractère peu alcoolisées... si l'on excepte la XXXB de Batemans, aussi corpulente et complexe qu'ne ambrée belge à 7,5%, mais avec un misérable 4,8% d'alcool, et une amertume décente en plus !...

Ah, et y'a pas de brasserie ou micros suisses non plus...
J'ai eu quelques infos sur l'arrangement prévu d'un des brasseurs qui a été en contact avec eux, et on comprendra un peu mieux pourquoi. Les stands étant trop chers pour une micro seule, la plupart devraient passer leurs bières dans un bar général. Et là, l'arrangement est :
- soit la brasserie donne la bière, paie 100 euros de frais et les organisateurs prennent en charge transport et taxes douanières.
- soit la brasserie facture les bières, et paie 250 Euros de frais, plus le transport et les douanes.
L'un dans l'autre, les quantités concernées étant relativement faibles, l'investissement n'est pas rentable par rapport aux retombées qu'il y a à en attendre, du moins pour un brasseur en activité principale, qui tente d'en vivre.
Donc aux dernières nouvelles, pas de micro-brasseries suisses à Strasbourg. Et les raisons de l'absence des micros britanniques sont certainement semblables.

jeudi 8 octobre 2009

Petits arrangements avec la réalité...

"Bier braucht Heimat", comme disent les brasseurs alémaniques : la bière a besoin d'une patrie, d'un terroir. Quel que soit le type de bière, elle est rarement aussi bonne que sur le lieu de production. Ajoutez à ça la demande accrue dans le domaine alimentaire pour des produits locaux, traçables, aux producteurs connus, et le résultat peut être spectaculaire : dans les deux ans qui ont suivi la fermeture en 1996 de la brasserie du Gurten à Berne par Feldschlösschen, tant Felsenau à Berne qu'Egger à Worb avaient pratiquement doublé leurs volumes de production, parce que la demande dans la région de Berne pour de la bière locale s'était reportée chez eux.

Du coup, en Suisse, on ne manque pas de bières à identité locale. Par contre, elles ne sont pas forcément produites où leur nom le laisse croire.
Le Switzerland Beer Guide de mon excellent compère Bov est à ce titre assez instructif, surtout quand on le confronte avec les sites web des brasseries concernées...

D'un côté, les deux groupes qui dominent le marché Suisse ont gardé leurs marques locales. Si Carlsberg Suisse produit toujours la Valaisanne à Sion, les marques Gurten, Warteck, ou Hürlimann, liées respectivement à Berne, Bâle et Zurich, sont produites à Fribourg ou à Rheinfelden.
Chez Heineken Suisse, Haldengut à Winterthur a été fermée depuis belle lurette, et la production transférée chez Calanda à Coire. Calanda qui est en voie de fermeture, vu qu'Heineken a racheté Eichhof à Lucerne au printemps 2008 et a annoncé vouloir y concentrer sa production.

Mais les grosses brasseries n'ont de loin pas le monopole de ce genre de chose...

A Genève, on a vu il y a quelques années le feuilleton délirant de la Belle de Genève, tour à tour brassée par Turbinenbräu à Zürich, et apparemment par la Brasserie Artisanale du Sud à Nyons (dans la Drôme, en France) et je ne sais qui encore, avant de disparaître du paysage, malgré diverses annonces de retour émanant des uns et des autres.

Au bout du Léman toujours, cela fait dix ans que les frères Papinot écoulent une gamme de bières sous la marque Calvinus, en insistant sur l'identité genevoise de produits qui sortent des cuves de Locher à Appenzell. La solution provisoire annoncée à l'époque du lancement de la blanche est donc devenue passablement définitive. Les recettes sont spécifiques à la marque, mais le lieu exact de production n'apparaît pas sur l'emballage.
Bon, en étant très mauvaise langue, on pourra dire que ça vaut peut-être mieux, vu le niveau général peu emballant des brewpubs et micros genevois...
Et peut-être bien que les frères Papinot se sont, eux, rendus compte de la grande difficulté qu'il y a à reprendre une production dans ses propres installations et à y reproduire une bière de manière fiable.

A Zürich, on trouve Striker, qui tartine sur son site web à propos de la diversité et la tradition de la bière à Zürich, mais admet dans la foulée que sa bière est brassée dans l'Allgäu, en Bavière...
Züri Hell aussi mettent en avant leur identité zurichoise, en particulier l'usage de houblon venant du canton de Zurich... il n'empêche que la bière est produite (et aussi commercialisée) Par Sonnenbräu à Rebstein, dans le canton de St-Gall...

A Bâle, la Basler Zeitung a récemment creusé la question : Si Fischerstube / Ueli-Bier affichent clairement sur leur bière en bouteille qu'elle est brassée par Lasser à Lörrach, juste de l'autre côté de la frontière avec l'Allemagne - ce qui avait un certain sel à l'époque de la Tut-Anch-Ueli, qui contenait de l'épeautre cru et des dattes -, les autres petits brasseurs bâlois ne s'embarrassent pas trop de transparence.
Unser Bier, par exemple, qui produit bel et bien de son côté, fait produire la moitié de ses bières à l'extérieur, sans l'indiquer sur les étiquettes ni annoncer clairement où.
Et il y a Em Basler sy Bier, avec un joli numéro d'équilibriste... D'après le site web, très branchouille, c'est une bière bâloise brassée avec du houblon bio et de l'orge bio de la région bâloise... enfin, en partie avec de l'orge de la région, parce qu'il n'y en n'a pas assez sur le marché.
L'eau, quant à elle vient "d'une des 16 sources du Rhin", et c'est là que ça commence à coincer : La source du Rhin en question est la rivière Sitter, qui se jette dans le Rhin à Thur, en Thurgovie, et passe par... Appenzell.
En fait, Em Basler sy Bier est elle aussi produite par Locher à Appenzell, ce qui fait un peu tache par rapport aux prétentions 100% bâloises affichées par la boîte. Et la chose n'est bien sûr pas indiquée sur l'étiquette.

A Bienne, j'ai un autre exemple de brasseur multipliant les bières à façon et d'étiquette pour d'autres : Aare Bier à Bargen, près d'Aarberg.

Outre sa gamme propre (Kellerfrisch, Amber et Weizen) Aare Bier produit depuis 2006 les Bier-Bienne 1 (ambrée) et 2 (blonde) pour Augenbrauerei Biel, à savoir le binôme Pooc / Bier-Bienne.
La provenance est déclarée spontanément au bar Pooc quasi-unique point de vente à la pression, et figure maintenant sur les étiquettes des bouteilles. C'est donc une situation limpide, avec des recettes spécifiques et une implication concrète du commanditaire dans toutes les phases de production (l'ami Trini garde sa bière à l'oeil de bout en bout...) En outre, le lieu de production est à moins de 15 kilomètres de Bienne.

Aare Bier produit aussi, la bière vendue à Lucerne par Lozärner Bier, chose indiquée sur l'étiquette.
Les produits de Braukultur AG à Uetikon am See au sud de Zürich, Goldküstenbräu, Oberländerbräu et Usterbräu Export (en collaboration avec Brauerei Uster) sont aussi produits par Aare Bier, chose annoncée sur l'étiquette, mais qui fait quand même un peu rigoler par rapport au ronflant "Centre de compétences pour les productions locales de bière" mis en avant sur leur site web.

(Petite digression... dans une incarnation précédente, Goldküstenbräu avaient une "brasserie" dans un garage à Uetikon am See, occupé actuellement par Spiffing Ales, à savoir Robert Ellis, un sympathique expat Britannique. Robert Ellis produit bel et bien sur place des bières au pedigree very British. Il y a juste que quand il a repris les locaux, les écoulements et raccordements d'eau nécessaires pour brasser n'avaient jamais été mis en place... No comment!)

Mais quand on les goûte - et qu'on connaît la gamme Aare Bier "normale"-  ces Lozärner, Goldküstenbräu et Oberländerbräu, on a comme une étrange impression de déjà vu :

La Lozärner Bier est sans doute possible de l'Aare Kellerfrisch sous une autre étiquette...
La Goldküstenbräu et l'Oberländerbräu Hell sont aussi très probablement de la Kellerfrisch, alors que l'Oberländerbräu Amber est sans doute possible une Aare Amber... le tout bien sûr ré-étiqueté.

Le cas de l'Usterbräu Export est un peu moins clair : il y a une parenté indéniable avec l'Aare Amber, mais pas à l'identique. S'agirait-il d'un mélange avec autre chose ? A priori pas de la Kellerfrisch vu la couleur très proche de l'Aare Amber... et là, de deux choses l'une : soit il y a addition d'un colorant (genre Sinamar), ou c'est un mélange avec une autre bière ambrée.
Auquel cas : il n'y a à ma connaissance qu'une autre bière ambrée produite chez Aare Bier...

Plus que le jeu dangereux qu'Aare Bier joue ici avec sa réputation en ré-étiquetant ses produits, par ailleurs franchement bons, on peut s'interroger sur les intentions des commanditaires :

- Pensent-ils vraiment ramener la production à terme à Lucerne, respectivement Zürich ? 
- S'ils le font, reprendront-ils la même recette (ou une autre) ?
- Pensent-ils vraiment que les consommateurs ne se rendront pas compte, à ce moment-là, que la bière est différente ?

Fondamentalement, ces commanditaires commercialisant des bières produites ailleurs sont contraints de jouer la carte locale, car elle est la seule spécificité claire face aux produits de masse d'Heineken Suisse et Carlsberg Suisse.
C'est d'autant plus sensible côté alémanique, où la plupart des petits brasseurs sont viscéralement incapables de sortir de la demi-douzaine de styles de bière germano-suisses usuels (l'excuse étant "c'est ce que les clients veulent..." Bien sûr, s'ils ne connaissent rien d'autre !), et ne peuvent donc se différencier des gros sur ce terrain-là...

La question qu'on me posera est "pourquoi déballer tout ça" ?
C'est simple : il y a un gros défaut de transparence vis-à-vis du consommateur.
A force de bricolages du genre, l'importance qu'on apporte encore au principe vital de bière locale risque de ne plus être qu'une coquille vide...

Auso: zum Wohle mitenand !

[Avec un grand merci à Bov pour les quelques échantillons édifiants]

mardi 6 octobre 2009

Les brasseries sans brasserie

J'ai mentionné, dans la deuxième tranche du compte-rendu de ma virée à Bruxelles, le fait que la Brasserie de la Senne a démarré en brassant chez De Ranke, qui eux-mêmes avaient démarré en brassant chez Deca.

Ce phénomène des "brasseries sans brasserie" est relativement répandu, et prend de multiples formes, qui sont d'une transparence variable pour le consommateur...

Il y a d'abord le cas, déjà évoqué ci-dessus, du brasseur qui loue les installations d'un confrère à la journée pour y brasser sa bière car il démarre, et n'a pas les fonds de départ pour acheter son outil de production. Le collègue y trouve aussi son compte, car il amortit son installation ce faisant. Ce mode de fonctionnement est généralement provisoire (ça dure souvent quelques années, tout de même, le temps d'imposer les produits et de se tailler une clientèle) et ne pose pas trop problème, car c'est bien le brasseur qui produit la bière selon sa propre recette et en contrôlant pratiquement totalement le processus. Ce dernier point  a l'avantage de rendre généralement relativement indolore le transfert des bières au moment où la brasserie démarre ensuite dans ses murs. Il suffit généralement de trois ou quatre brassins pour réajuster les bières et revenir très près du profil d'origine.
La chose est toutefois rarement mentionnée sur les étiquettes, et c'est la seule chose qu'il y aurait à redire du point de vue du consommateur.

Ensuite, il y a le brasseur qui fait brasser sa bière chez un confrère. Les raisons sont souvent les mêmes, à savoir de lancer le produit et de se tailler une clientèle avant d'avoir à investir dans l'outil de production. Mais là, c'est le confrère qui se charge de la mise au point concrète du produit, pas le brasseur titulaire. Du coup le transfert vers l'outil de production définitif est souvent un problème, car le brasseur ne maîtrise pas son produit.

Parfois la bière est brassée à l'extérieur uniquement pour la mise en bouteille, la brasserie ne disposant pas d'une ligne d'embouteillage à elle.
Moins anodin, on rencontre aussi des cas où manifestement, le brasseur théorique n'a nullement l'intention de produire lui-même la bière. Ce genre de provisoire a donc parfois tendance à durer.
Là aussi, le lieu effectif de production de la bière n'est pas toujours indiqué sur l'étiquette.
En France, passablement de bières qui mettent en avant une image de produit régional sont en fait produites ailleurs. On a ainsi vu par le passé des bières corses dont l'étiquette, en petites lettres, disait qu'elles étaient produites par Duyck dans le Nord de la France et des bières basques, jurassiennes ou savoyardes produites par Castelain, eux aussi dans le Nord.
En outre, bien que n'en n'ayant pas eu entre les mains depuis une année ou deux, il me semble que la Tonnerre de Brest "bretonne" aux algues porte toujours une estampille agroalimentaire en "B" comme Belgique, et non "FR" comme France.
Et j'ai aussi souvenir d'une autre société condamnée en mars 2003 pour avoir vendu comme bière bretonne une bière brassée à façon en Belgique.

Le cas de figure suivant est la bière d'étiquette, où le donneur d'ordre, titulaire de la recette, n'est pas vraiment une brasserie, mais par exemple une chaîne de supermarchés, un grossiste, ou un cabinet de marketing qui fait produire à façon une bière sous sa propre étiquette. Là, la provenance effective est souvent quasi-impossible à établir.

Et on trouve parfois pire, à savoir des bières qui ne sont que le simple ré-étiquetage de bières existantes. Là, la tromperie peut atteindre des sommets, parce que le brasseur "nominal" non seulement ne brasse pas lui-même la bière, mais en plus, il n'est même pas propriétaire de la recette. Si le but est ensuite de reprendre la production dans ses propres murs, le décalage en termes de goût risque d'être assez important et surtout passablement définitif...
Est-ce à dire que les commanditaires qui se livrent à ce genre de bricolage seraient persuadés que leurs clients sont assez crétins pour ne pas faire la différence ? On n'oserait pas insinuer ça, voyons...

Evidemment, ce genre de pratique étant assez répandues sur certains marchés, c'est un véritable créneau dont des brasseries tirent une part plus ou moins importante de leurs revenus.

J'ai mentionné plus haut les nos de Castelain et Duyck comme producteurs connus à façon en France. En Allemagne, nombre de brasseries de moyenne et grande taille produisent de la bière premier prix pour les supermarchés, dans le flou le plus total...
La Belgique compte aussi un certain nombre de brasseurs à façon, les noms de Du Bocq, Huyghe, Lefèbvre ou Van Steenberge étant souvent évoqués dans le milieu. Apparemment, une brasserie comme Huyghe aurait quelque chose de l'ordre de six ou sept bières de base, leur large gamme propre et leur production à façon étant ensuite obtenue par des mélanges, des dilutions, des ajouts d'épices ou d'arômes, voire des colorations.

Il y a même une brasserie en Belgique, De Proefbrouwerij, dont la vocation même est de produire des bières à façon, en général des spécialités en petits tonnages, pour des brasseries sans brasserie, voire pour des brasseries établies désirant essayer une nouvelle recette ou disposer d'une spécialité en petite quantité. Si les recettes sont apparemment souvent originales, et une partie de la production de De Proef pour des tiers est clairement identifiée comme telle, l'essentiel de leur production semble ne pas être revendiquée sur les étiquettes, ce qui pose un gros problème de transparence vis-à-vis du consommateur.

(Pour en savoir plus sur l'étendue du phénomène en Belgique, et si on veut éviter de s'y faire fourguer de la bière d'étiquette, on compulsera avec profit l'excellent Good Beer Guide Belgium de Tim Webb)

Et en Suisse alors ? Ooooh, oui, y'en a aussi, une jolie floppée, même. Et slalomant souvent à la limite de la tromperie sur l'origine géographique du produit.

Mais le détail sera pour un de ces prochains jours...

lundi 5 octobre 2009

Fin de l'été indien...


Une choucroute… autrement !

Recette née d'un jour de "Huurmmmpppffff… qu'est-ce qu'il y a dans le frigo ?", c'est une manière de préparer la choucroute sans qu'elle devienne une orgie de cochonnaille, et en lui ajoutant des légumes un peu doucereux une fois cuits, comme les carottes, pour obtenir un goût équilibré, et en tirant parti de l'association fumée / paprika. Un plat pour temps froid et humide...

Pour 4 à 6 personnes

100g de lardons fumés
2 oignons hachés
300-400 grammes de légumes doux (carotte, fenouil, céleri etc., évt. un poivron rouge), râpés
500 grammes de choucroute crue
500 ml d'une bière ambrée à profil malté / doux (pale ale, märzen, hefe-weizen)
poivre, pincée de sel ou cube de bouillon de légumes
2 c à café de paprika doux, et 1 c. à café de paprika fort
2 c. à café de carvi ou de jeerah (cumin indien)
autres épices selon inspiration…
Dans une grande poêle à bord haut (dotée d'un couvercle) ou une casserole, faire sauter à feu vif oignons et lardons dans une goutte d'huile, en laissant l'oignon roussir un petit peu. Ajouter la choucroute rincée, les légumes râpés, les épices, couvrir et laisser suer les légumes quelques minutes à feu moyen. Ajouter la bière, porter à ébullition. Si la bière mousse trop, une petite goutte d'huile résoudra le problème. Cuire à couvert, à feux doux pendant 45 minutes, en remuant de temps en temps, et en ajoutant un peu d'eau si nécessaire. Ce plat peut caraméliser un peu, mais sans brûler.
Servir avec des rösti, des spätzli ou des gnocchi, par exemple. Les restes de choucroute réchauffés à la poêle avec un reste de röstis sont délicieux.
Accompagner ce plat d'une bonne pilsner (Rothaus Tannen Zäpfle, Budvar, Boxer Premium, par exemple) ou une Weizenbier (Schneider, Paulaner ou autre…).
On peut faire une variante végétarienne sans lardons, mais avec des tomates séchées émincées et éventuellement une bière fumée (Schlenkerla, par exemple), et un bon bout de gruyère vieux sur l'assiette.

vendredi 2 octobre 2009

Mission spéciale à Bruxelles. Episode II


Or donc, comme je le racontais l'autre jour, j'ai été invité en mission esssspéciale dans ce paysage brassicole bruxellois où l'autosatisfaction et la complaisance corporatistes ne sont pas sans rappeler ce qu'on peut observer chez les chocolatiers industriels suisses.

Il s'agissait de ramener ma fraise de bièrophile francophone disposant d'une expertise à peu près passable dans les domaines britannique et germanique dans le cadre de la formation du staff des Chez Moeder Lambic, tant l'historique de St-Gilles que celui qui ouvrira prochainement à la Place Fontainas, au centre de Bruxelles.
(Moeder se prononce "moudeur", soit dit en passant...)

Oui, parce que, en prévision de l'ouverture du nouveau bar, Nassim Dessicy et Jean Hummler, les deux associés propriétaires de Chez Moeder Lambic ont décidé d'investir dans leur personnel, de les engager à l'avance, et de les former en un bloc de deux semaines. C'est assez rare pour être relevé, et c'est une des raisons qui m'ont poussé à participer à l'affaire... enfin: ça, et la solide éthique de travail de ces messieurs.

Mon rôle précis là-dedans était d'assurer les deux dernières (petites) journées de cours, en ouvrant la perspective sur les traditions brassicoles germaniques et britanniques, la culture brassicole belge étant passablement centrée sur elle-même, comme en Allemagne, et ignorant volontiers ses voisines...
Dit crûment : le buveur moyen belge est à peu près aussi ignare en matière de bière que le buveur moyen suisse ou français, à ceci près qu'il est souvent persuadé d'avoir la science infuse, en raison de sa nationalité. (A ce titre, il est très semblable au buveur moyen bavarois ou allemand...) Je craignais donc un peu de devoir lutter à contre-pente avec un auditoire hermétique...

Mais je me suis trouvé face à un échantillonnage d'une trentaine de barmen et barmaids, futurs ou confirmés, d'origines et de parcours divers, pour la plupart de moins de 30 ans, et surtout, remarquablement intéressés et réceptifs à se faire raconter la bière hors de leur pré carré.

Il est vrai que Chez Moeder Lambic est un lieu pas comme les autres, une légende un peu décatie qui a repris du poil de la bête quand Nassim et Jean en ont repris les commandes en 2006, en y imposant une éthique de travail et en resserrant les boulons du bon sens élémentaire pour rendre l'affaire viable.

Chez Moeder Lambic à St-Gilles, il n'y a plus qu'environ 200 bières à la carte, au lieu de 800 et quelques auparavant. La raison première est de permettre une gestion réaliste du stock, mais ce coup de balai a aussi permis de ne garder que les bières de qualité produites par des brasseries artisanales et au pedigree parfaitement transparent.

Enfin presque, parce qu'il reste "du Disney", comme ils disent, sous la forme de la gamme Grisette, deux ou trois blanches aromatisées aux fruits vendues par St Feuillien (qui les sous-traite à Affligem, donc Heineken Belgique).
Pour sortir du Disney sans trop se violenter le palais, on y trouvera du Faro (lambic sucré, qui rappelle un cidre doux) de chez Cantillon, ou, pour les palais plus aguerris, du lambic et de la kriek de même source... Hors grossistes, c'est actuellement, sur 38 mètres carrés, le plus gros débit Cantillon de Belgique. Ce quilaisse rêveur quand on pense à la surface et la fréquantation de certains bièrodromes du centre de Bruxelles, Cantillon étant tout de même établis à Bruxelles...

De manière peut-être plus significative encore, Chez Moeder Lambic se passe totalement de lager blonde à la pression, cette pils pilier quasi-obligatoire des bars belges. Elle est remplacée avec un indéniable succès commercial, par l'excellente Taras Boulba de la Brasserie de la Senne, une fermentation haute à 4,2% (version pression), sèche et bien houblonnée, pas loin d'une bitter anglaise qui aurait pris un fort accent belge.
Ses sœurs Stouterik (stout à 4,5% à l'anglaise, avec un petit accent belge aussi) et Zinnebir (ale blonde à 6% très houblonnée, parfait antidote à l'excès de clones de L*ffe Blonde), confirment qu'il y a bel et bien de bonnes bières belges à moins de 6.5% d'alcool...

La Brasserie de la Senne est, soit dit en passant, une des valeurs montantes côté brasseries en Belgique, aux côtés de Jandrain Jandrenouille, Struise et Rulles, par exemple. Ils devraient commencer à brasser sur leurs propres installations cet automne, mais vont pour le moment brasser chez De Ranke, la brasserie à qui on attribue le retour il y a de cela une bonne décennie de houblonnages plus massifs dans la bière belge, avec la XX Bitter et la Guldenberg.
Ce genre d'arrangement, voyant un brasseur louer les installations d'un confrère pour y brasser sa bière, est plutôt une bonne chose, permettant à des brasseurs de démarrer en permettant à un confrère d'amortir un peu plus son installation. A ceci près que la chose soit être transparente vis-à-vis du consommateur, et que ce ne doit pas être l'occasion de bricolages douteux, comme le simple ré-étiquetage d'une bière existante...
C'est en brassant chez Deca que De Ranke ont eux-mêmes démarré, et depuis que De Ranke ont leur propre brasserie, Struise brassent chez Deca, en attendant d'avoir leur propre brasserie.

Bref, revenons à nos Moeder, euh, moutons...

Chez Moeder Lambic va donc prochainement essaimer à la Place Fontainas, proche de l'hypercentre de Bruxelles, dans les 200 mètres à l'ouest du manneken pis, mais hors du périmètre de l'îlôt sacré, de ses restaurants à poisson et de ses hordes de touristes.
L'emplacement précis, est entre un salon-lavoir et un bouquiniste spécialisé dans la photo érotique, est intéressant, sur une place qui va devenir en bonne partie piétonne à l'avenir.
De très gros travaux ont été nécessaires, mais ont permis de construire un bel outil de service de la bière : 40 tireuses à pression, tous les fûts étant dans une chambre froide, auxquelles s'ajoutent 6 pompes manuelles qui débiteront du lambic plat, et des frigos pour une sélection de bouteilles.
Et, ce qui justifiait ma descente sur Bruxelles, une partie de la gamme devrait, à terme, être constituée de bières non-belges, avec une sélection germano-britannique en bouteille et des bières invitées provenant chaque mois d'un autre pays, en rotation.

Y'aura pire, quoi, comme abreuvoir...
L'ouverture est prévue pour le 30 octobre, et tout le mal que l'on peut souhaiter à Nassim et Jean et leur sympathique horde sauvage est que leurs efforts soient couronnés de succès et que Chez Moeder Lambic Fontainas connaisse le succès qu'il mérite à mon humble avis - un avis pas objectif du tout et qui ne cherche absolument pas à l'être !

Chez Moeder Lambic St Gilles, Rue de Savoie 68 à St Gilles (tram 55, arrêt Albert) 

Chez Moeder Lambic Fontainas, Place Fontainas 8 à Bruxelles (métro station Anneessens)

jeudi 1 octobre 2009

Gaussons nous un peu...

...parce qu'Heineken France a déjà sorti ses bières de Noël, avec trois mois d'avance.

Le communiqué tel que répercuté dans quelques médias est un monument de langue de bois brassicole, ou de l'art de faire passer des bières plus ou moins quelconques pour des grands crus d'exception en invoquant la caution d'un chef de resto gastro-branchouille.
On notera aussi cette fixation très gauloise sur les cocktails à la bière, comme si la bière ne pouvait se suffire à elle-même et devait impérativement être mélangée à autre chose...

PS : en plus, sur le site de La Dépêche de Toulouse, c'est dans le rubrique "Au féminin" qu'on publie ça...