dimanche 28 février 2010

Rimini : Birra dell'Anno

Rimini ? En février ?

Oui, Rimini en février. Birra dell'Anno, le concours national ouvert aux brasseries artisanales italiennes, organisé par Unionbirrai a été déplacé de l'automne à février, afin de coïncider avec Pianeta Birra, le grand salon italien de la bière.
Ce qui a signifié un déplacement du concours vers Rimini. Et accessoirement qu'il n'y a pas eu d'édition 2009.

Les changements dans l'organisation ont aussi été importants, tant au niveau structurel qu'au niveau des personnes - avec une certaine déperdition d'expérience pratique - et non sans petits hoquets qui seront certainement réglés pour les prochaines éditions.

308 bières en concours, issues de 58 brasseries artisanales italiennes, non pasteurisées, et en bouteille.

15 membres du jury (à l'origine 16 étaient prévus) répartis en deux tables, elles-mêmes divisées en deux. Parmi eux, des pointures telles que Garrett Oliver (Brooklyn Brewery, USA), Hans-Peter Drexler (Schneider Weisse, D), Yvan de Baets (Br. de la Senne, B), Randy Mosher (AHA, USA), Carl Kins (Zythos/EBCU, B) et votre serviteur...

Le processus implique l'évaluation à l'aveugle de chaque catégorie dans son entier par une des deux tables à l'aide d'un formulaire assez complet dont la partie gauche est remise au brasseur, et la partie droite, chiffrée, reste entre les mains des organisateurs.
Dans un deuxième temps, une finale regroupant les 10 meilleures de chaque catégorie est jugée par l'autre table, qui détermine quelles sont les 5 meilleures, et dans quel ordre, ceci par discussion uniquement, ce qui peut prendre beaucoup de temps pour des catégories très larges comme les bières aux épices ou les bières aux fruits.

La catégorisation des bières est loin des typologies surdéveloppées à l'américaine, et permet de faire la place à certains objets brassicoles non identifiés qui n'entreraient pas dans une typologie trop rigide. Les quelques juges nord-américains ont cependant eu un peu de peine à s'y adapter.

On a aussi pu assister à quelques retentissantes collisions entre visions britanniques, allemandes et nord-américaines, par exemple sur les niveaux acceptables de diacétyle dans telle ou telle bière, ou pour les  bières aux fruits, si l'on devait juger la présence forte de fruits ou plutôt des bières qui fonctionnent bien dans l'absolu avec un fruit intégré dans l'ensemble.

L'un dans l'autre, sur deux jours, nous avons passé 18 heures sur le métier...
Deux journées, de 10 heures du mat' à 8 heures le soir, avec une heure de pause de midi. Chaque juge n'ayant certes pas dégusté les 308 bières, mais quelques chose de l'ordre de 110, qui correspondent à un volume effectif ingéré de l'ordre de 6 litres au total (donc dans les 3 litres par jour). Non, le problème à gérer, bien plus que l'alcool, c'est la fatigue du palais et la difficulté à maintenir la concentration au niveau nécessaire.

Comme je le faisais remarquer à un des jeunes membres d'Unionbirrai chargés du service qui me demandais avec un sourire en coin si ce n'était pas trop dur comme boulot, oui, c'est assez trapu comme travail, et bien plus dur sur la distance qu'il n'y paraît de l'extérieur... ce à quoi il m'a répondu "...comme un acteur porno ?" Ahem, oui, chacun ses analogies, mais y'a un peu de ça...

Bref, les résultats, montrant une belle variété de brasseries primées, entre les valeurs sûres (Baladin, Birrificio Italiano, Birrificio Lambrate, Bi-Du et Birra del Borgo y sont) et les étoiles montantes (comme Pausa Cafè - un projet de réinsertion de prisonniers, soit dit en passant - ou, en particulier del Ducato, pour qui cette édition est une consécration retentissante), ont été proclamés le dimanche 21 février à Pianeta Birra, il y a pile une semaine - oui, j'ai un peu de retard, pour changer....
Ceci devant une jolie petite foule, les brasseries, les sponsors, et les membres du jury.

Les voici :

Fermentation basse jusqu'à 14° Plato
1) Levante (Statale Nove)
2) Philippe (Renazzese)
3) Omnia (Babb)
4) Via Emilia (Ducato)
5) Durgnes (Birra di Meni) 
Fermentation basse à plus de 14° Plato
1) Pirinat (Birra di Meni)
2) Volpe (Mosto Dolce)
3) Porpora (Lambrate)
4) Bibock (Birrificio Italiano)
5) Amber Shock (Birrificio Italiano)
Fermentation basse jusqu'à 12° Plato
1) Adi (Baüscia)
2) Blonde (Vecchia Orsa)
3) Miloud (Lariano)
4) Perlanera (Trunasse)
5) Terrarossa (B94)
Fermentation haute entre 12° Plato et 16° Plato
1) Terzo Miglio (Rurale)
2) 33 Ambrata (Birra del Borgo)
3) Ligera (Lambrate)
4) Skizoid (Toccalmatto)
5) Mervisia (Civale) 
Fermentation haute à plus de 16° Plato
1) Surfing Hop (Toccalmatto)
2) Reale Extra (Birra del Borgo)
3) Re Ale (Birra del Borgo)
4) Confine (BI-DU)
5) Stout (Vecchia Orsa)
Bières à haute densité - 20° Plato et plus
1) Xyauyù (Baladin)
2) Verdi Imperial Stout (Ducato)
3) Toccadibò (Barley)
4) Imperial (Maltus Faber)
5) Noel (Baladin) 
Bières aux épices
1) Zingibeer (Doppio Malto)
2) Sally Brown Baracco (Ducato)
3) Christmas Cru (Almond ‘22)
4) Grand Cru (Almond ‘22)
5) San Genesio (Lariano)
Bières contenant un apport de 20% au moins de céréales autres que l'orge
1) 100% Farro (Petrognola)
2) Bianca Piperita (Opperbacco)
3) Sally Brown (Ducato)
4) Nera (La Petrognola)
5) Bianca (Maltus Faber) 
Bières à la châtaigne
1) Castegna (Valscura)
2) Falt-Truna (Corte di Campiglia)
3) Beltaine alle Castagne (Beltaine)
4) Caravina (Lariano)
5) Palanfrina (Troll)
Bières aux fruits
1) Filo Forte Oro (Pasturana)
2) Martina (Pausa Cafè)
3) Mama Kriek (Baladin)
4) Luna Rossa (Ducato)
5) Jadis (Toccalmatto) 
Bières vieillies dans du bois
1) Black Jack Verdi Imperial Stout (Ducato)
2) P.I.L.S. (Pausa Cafè)
3) Sparrow Pit (Birrificio Italiano)
4) Super Sayan (BI-DU)
5) Italian Strong Ale (Toccalmatto)

4 commentaires:

Rémi a dit…

Les catégories sont effectivement relativement originales, par rapport à ce qu'on voit en général... La plupart sont quand même relativement logiques, mais je suis un peu surpris par deux en particulier, bière vieillies dans du bois et surtout bière à la châtaigne.

Bière vieillies en fût, à la limite, c'est sur le principe courant, mais je n'aurais pas pensé que c'était assez répandu pour mériter une catégorie à soi. Enfin, j'imagine que dans un pays fortement viticole (et qui a sans doute un peu moins de snobisme viticole que la France), c'est assez facile pour un brasseur non seulement d'imaginer une telle bière, mais aussi de trouver de quoi la réaliser.

Je suis nettement plus surpris par la châtaigne, c'est si courant que ça en Italie ? Dans ce que je connais du reste de l'Europe, c'est quand même très original, je n'en connais qu'une ou deux. Exception italienne ? Nouveauté qui monte ? Petite catégorie ?

Laurent Mousson a dit…

Ben les bières "passées au bois", c'est le truc en vogue aux Etats-Unis depuis quelques années, et les Italiens, avec leur culture viticole et relative absence de tabous côté bière (par rapport à la France ou à la Suisse, c'est frappant de liberté dans l'approche de ce qui se fait ou pas...), n'ont pas mis longtemps à suivre...

Bières à la châtaigne ? ben y'en avait quoi, une douzaine ou une quinzaine en concours... avec de la farine de châtaigne, des châtaignes séchées, des châtaignes rôties et/ou du miel de châtaigne...

(Kuaska prétend que c'est de ma faute, que j'ai été le premier à mettre le doigt sur le fait que ça semblait se développer bien plus en Italie qu'ailleurs, au point de devenir une spécificité nationale...)

Quoi qu'il en soit, vu le nombre qu'il y en a, et la nature de l'ingrédient, ça a un certain sens de les séparer des bières "aux autres céréales"...

Rémi a dit…

Et gustativement, ça apporte quelque chose de spécial, la châtaigne ? Je veux dire, j'ai déjà goûté un ou deux trucs, mais d'ici à juger que c'était un ingrédient majeur au point de caractériser une bière... ?

Je vois bien que c'est difficile de dire que c'est une "autre céréale", ni que ce soit une bière "aux fruits" (bien que, botaniquement parlant...), mais à part le nombre de bières, quelque chose dans le goût justifie-t-il une catégorie à part ? J'imagine que la majorité des bières "aux autres céréales" devaient être au blé, et pourtant c'était une seule catégorie...

Laurent Mousson a dit…

Châtaigne: ça amène une petite rondeur tirant sur la noisette, souvent relativement discrète, et une amertume boisée plus ou moins intense.
En gros, pense au côté aromatique d'un miel de châtaigner, sans le sucré, et tu auras un début d'idée...
Du coup, ce sont celles qui contiennent du miel de châtaigner en plus des châtaignes qui ont en général le caractère le plus tranché... (à part celle de Troll, un petit monstre sec, nerveux, amer, et aromatisé au laurier, ce qui est traditionnel pour aromatiser une polenta de châtaigne dans certaines régions d'Italie).

Il y a probablement un peu de politique là-dedans, mais on ne peut AMHA pas reprocher aux organisateurs de chercher à mettre en avant une des spécificités de la scène brassicole italienne.

Bières aux autres céréales ? ben non, pas que du blé, mais de l'épeautre, du kamut, voire du seigle, pas mal d'autres choses, en fait...